Notes pour une allocution devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes
Par l'honorable Jean-Pierre Plouffe
Commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications
Le 15 novembre 2016
L'allocution définitive fait foi
M. le Président, honorables députés, je suis heureux de comparaître devant ce comité au sujet du projet de loi C-22. Je suis accompagné par Monsieur Bill Galbraith, directeur exécutif de mon bureau.
Avant de faire quelques remarques sur le projet de loi que ce comité étudie, et puisque c'est ma première allocution devant ce comité, je vais décrire très brièvement le rôle de mon bureau.
Vous avez ma biographie et un sommaire de mon mandat, alors je ne m'attarderai pas là-dessus, mais j'aimerais souligner que mes décennies d'expérience en tant que juge m'ont été très utiles dans mon rôle de commissaire du CST, un rôle que j'assume depuis plus de trois ans. La Loi sur la défense nationale, qui fixe le mandat de mon bureau et du CST, exige que le commissaire soit un juge à la retraite ou un juge surnuméraire d'une cour supérieure.
Le commissaire du CST est autonome et sans lien de dépendance avec le gouvernement. Mon bureau a son propre budget accordé par le Parlement. J'ai tous les pouvoirs en vertu de la partie II de la Loi sur les enquêtes, qui m'accorde un accès complet à toutes les installations, tous les fichiers, tous les systèmes et tous les membres du personnel du CST, et qui me confère le pouvoir d'assignation, au besoin.
Le rôle externe et indépendant du commissaire, axé sur le CST, est d'aider le ministre de la Défense nationale, qui est responsable du CST, à rendre des comptes au Parlement et, en définitive, à la population canadienne, en ce qui a trait à cet organisme.
Permettez-moi maintenant d'aborder le projet de loi C-22.
J'ai déjà mentionné que la participation accrue des parlementaires à la reddition de compte en matière de sécurité nationale est la bienvenue.
Plus particulièrement, depuis la divulgation par Edward Snowden de renseignements classifiés volés provenant de la National Security Agency des États-Unis et de ses partenaires, dont le CST, la confiance du public envers les agences de renseignement et envers les organismes d'examen ou de surveillance, a été mise à l'épreuve. Ces divulgations ont considérablement changé le discours public.
Je crois que la mise en place d'un comité dont les membres détiendraient une habilitation de sécurité, en plus des organismes de surveillance spécialisés, tels que mon bureau et celui de mes collègues du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (CSARS), qui examine les activités du Service canadien du renseignement de sécurité, et de la Commission civile d'examen et de traitement des plaintes relatives à la GRC (CCETP), peut offrir un cadre de reddition de compte complémentaire solide et exhaustif en ce qui a trait aux activités liées à la sécurité et au renseignement, en plus d'accroître la transparence.
Je suis convaincu que ce comité aidera à restaurer et à améliorer la confiance du public, mais ce ne sera pas sans difficulté. Traditionnellement, le commissaire du CST était rarement invité à comparaître devant des comités parlementaires, et le travail de mon bureau n'a peut-être pas été reconnu à sa juste valeur. Le comité de parlementaires peut permettre d'attirer l'attention sur le travail important des organismes de surveillance spécialisés. Mon bureau et moi-même anticipons avec plaisir de travailler avec le comité et son secrétariat.
Cependant, afin de maximiser l'efficacité, les rôles respectifs du comité de parlementaires et des organismes de surveillance spécialisés doivent être bien définis, de façon à éviter le double emploi des efforts et le gaspillage des ressources. À mon avis, c'est primordial.
Éviter le double emploi est un thème évident, et je suis heureux de le voir abordé dans le projet de loi, à l'article 9, intitulé « Coopération ». Le message est clair, mais nous devrons travailler en étroite collaboration avec le secrétariat du comité pour garantir sa concrétisation. Les objectifs sont, à mon avis, d'assurer un examen d'ensemble complet et d'encourager la plus grande transparence possible.
J'ai des idées sur la façon dont nous pourrions entamer une relation productive avec le comité et son secrétariat. Nous pourrons peut-être examiner cette question plus en détail pendant la période de questions.
Il faut cependant discuter de certains points. J'ai quelques observations sur les différentes parties du projet de loi.
Le mandat en trois volets du comité, énoncé à l'article 8, est très large, afférent à toute activité y compris les opérations ainsi que des sujets reliés à l'administration, la législation et autres. Comme il est rédigé, ce sera une autre raison de travailler dès le départ en étroite collaboration avec le comité, afin de s'assurer que les rôles sont définis concrètement, non seulement pour éviter le double emploi, mais aussi pour assurer la complémentarité.
J'ignore les intentions du gouvernement quant à cette approche très large. Toutefois, la combinaison de ces mandats pourrait nuire grandement à l'efficacité du secrétariat. Le comité devra établir ses priorités. C'est là une autre occasion pour le comité et les organismes de surveillance de travailler en étroite collaboration pour assurer une reddition de compte globale efficace.
Ce qui est clair, c'est que le gouvernement a l'intention de mettre en place une surveillance ou un examen des activités de sécurité nationale et de renseignement des organismes et ministères qui ne sont pas actuellement soumis à un tel examen.
Il est crucial pour une surveillance efficace de maintenir la capacité d'examen ou de surveillance spécialisée comme elle existe, et de l'aménager pour les organismes et ministères divers qui ne sont pas soumis à un examen. Ceci pourrait se faire par l'établissement d'un ou de plusieurs organismes de surveillance, ou en les partageant entre les organismes de surveillance existants. Le comité des parlementaires se penchera sur ce sujet, j'en suis sûr.
Selon ma compréhension du projet de loi dans sa forme actuelle, il est clair que le comité n'a pas la même liberté d'accès que mon bureau ou le CSARS.
L'alinéa 8b) indique que le comité peut examiner « les activités » qui se rapportent à la sécurité nationale et au renseignement « à moins que le ministre compétent n'en décide » autrement. Cela pourrait limiter ce que le comité peut ou ne peut pas voir.
À mon avis, c'est là où la complémentarité du comité et des organismes de surveillance existants entre en jeu, avec l'assurance que ces derniers ont un accès sans entrave aux organismes qu'ils examinent. La lacune, c'est qu'il existe des ministères et agences qui ne sont pas soumis à la surveillance.
J'aimerais proposer deux modifications mineures au projet de loi, pour assurer une meilleure compréhension. Monsieur le président, je peux vous fournir ces suggestions séparément par écrit.
Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de vous adresser la parole aujourd'hui. Mon directeur exécutif et moi-même serons heureux de répondre à vos questions.
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